Le développement du réemploi des emballage est un levier d’économie circulaire important, pour lequel des objectifs ont été fixés au niveau réglementaire (loi « Anti-gaspillage pour une Economie Circulaire » et loi de « lutte contre le dérèglement climatique et renforcement de la résilience face à ses effets »). La loi AGEC, et notamment son décret d’application (n° 2022-507 du 8 avril 2022) fixent comme objectif d’atteindre 10% d’emballages mis en marché réemployés à horizon 2027.
Parallèlement, la mise en place effective du réemploi soulève de nombreux défis, car elle nécessite de revoir en profondeur le système de gestion des emballages, de leur conception à leur phase d’utilisation.
Dans ce contexte, l’ADEME a réalisé une étude sur les potentiels de développement du réemploi des emballages, au cours de laquelle elle a été accompagnée par I Care by BearingPoint, en partenariat avec le cabinet Gate C.
Une première étape d’étude des freins et leviers du réemploi par sous-secteurs
La première étape de cette étude a constitué à étudier les freins et les leviers du réemploi, c’est-à-dire les éléments qui le limitent, et les solutions qui permettent de mettre des solutions de réemploi en place.
Cette étude a été réalisée par sous-secteurs, c’est-à-dire par segment de produits mis en marché (ex : viandes, poissons ; riz, pâtes et légumes secs, etc.). La liste des sous-secteurs a été issue des travaux de la stratégie 3R.
Ont également été distinguées les modalités de réemploi, c’est-à-dire les différentes boucles logistiques et de modèle d’affaire associé pouvant exister dans un secteur.
Cette analyse s’est fondée sur la réalisation de 77 entretiens avec des acteurs des filières : fédérations, industriels, acteurs du réemploi, fabricants d’emballages, éco organismes, acteurs de la restauration, grandes et moyennes surfaces.
Les fiches sectorielles présentent ainsi les grandes modalités de réemploi existantes dans chacun des sous-secteurs, et les freins et leviers associés au déploiement de chaque modalité pour le secteur.
Une seconde étape de définition de potentiels de réemploi
La seconde étape de l’étude a consisté à établir des potentiels chiffrés que le réemploi pourrait atteindre, en pourcentage du nombre total d’emballages mis en marché dans le sous-secteur.
Un potentiel de réemploi de 5% dans un secteur signifie que 5% des emballages mis en marché sur une année pourraient être réemployés.
Deux types de potentiels ont été distingués :
- Un potentiel à court terme, c’est-à-dire 2027, qui prend en compte un ensemble de freins relatifs à la transformation des procédés industriels ;
- Un potentiel à moyen à long terme, indiquant le potentiel global que pourrait atteindre le réemploi dans le secteur. Ce potentiel prend en compte les freins techniques, c’est-à-dire relatifs à la nature du produit et aux incompatibilités absolues entre le réemploi et les produits vendus.
Le potentiel de réemploi à moyen à long terme est défini en prenant pour acquis que certaines actions sont mises en place, qui permettent le déploiement du réemploi à grande échelle.
La définition de ces potentiels a nécessité une étude approfondie sur chaque sous-secteur, afin de définir quelles étaient les modalités les plus à même de se développer. Cette étape a fait l’objet d’une phase importante d’établissement d’une méthodologie. Le détail des hypothèses est indiqué dans le rapport.
Un des grands enseignements de l’étude : l’effet de seuil du déploiement du réemploi
L’étude a permis d’identifier quelques grands enseignements concernant le réemploi.
Tout d’abord, il apparait que les freins et les leviers au réemploi peuvent être regroupés en quatre catégories : ils peuvent être de nature logistique, technique (c’est-à-dire relatifs à la nature du produit ou la nature de l’emballage), réglementaire, et vis-à-vis du consommateur.
De plus, il existe un véritable effet de seuil sur la mise en place du réemploi : la simplicité logistique et les coûts associés de sa mise en place dépend fortement du nombre de l’état actuel du réemploi dans le secteur.
Autrement dit, dans un secteur où les emballages sont standardisés et peuvent être mutualisés entre industriels (une bouteille de bière standard par exemple, pouvant être embouteillée par n’importe quel industriel), et où les laveurs sont bien répartis sur le territoire, alors la mise en place du réemploi est une solution très intéressante, logistiquement, économiquement et environnementalement parlant.
Le plan d’actions transverse donne des premiers éléments d’actions à mettre en place pour permettre de passer ce seuil :
- Développer au maximum des emballages standardisés et des solutions de lavage mutualisées (entre industriels, voire entre sous-secteurs) ;
- Développement important de la R&D sur les emballages et les modes d’étiquetage afin de trouver des solutions réemployables lorsqu’elles n’existent pas à date ;
- Déploiement massif d’actions de sensibilisation du consommateur au réemploi ;
- Anticipation des transformations industrielles nécessaire (notamment au niveau des lignes de conditionnement des produits).
Secteurs les plus à même de développer le réemploi des emballages
Un autre grand enseignement de l’étude a été d’établir des secteurs prioritaires pour la mise en place du réemploi, à la fois à court terme (pour atteindre l’objectif de la loi AGEC des 10% d’emballages réemployés à horizon 2027), mais également à plus long terme.
Ces secteurs sont les suivants :
- Les fruits et légumes : ces produits sont déjà largement vendus en vrac, et cette part va être amenée à augmenter (le décret d’application de la loi AGEC prévoit une diminution de la vente de fruits et légumes sous emballages plastiques). Les emballages peuvent être réemployés lorsque les consommateurs apportent leurs propres contenants (ex : sachets réutilisables), qu’ils réemploient par eux-mêmes
- Les boissons en consommation hors domicile (CHR), c’est-à-dire consommées en restaurants, brasseries, à emporter, dans des bars, etc : Ces boissons sont conditionnées et livrées en gros aux restaurateurs. Cette chaine logistique permet de collecter les emballages (ex : bouteilles de soda), et de les renvoyer aux industriels pour les réemployer. Une standardisation des contenants est un levier majeur pour faciliter ce type de réemploi.
- La restauration collective: Comme pour les boissons en CHR, les chaines d’approvisionnement facilitent la logistique inverse des emballages (c’est-à-dire leur collecte et leur acheminement vers le lavage puis le conditionnement).
- Les bières et cidres: Dans ce secteur, il y a peu de transformation nécessaire des bouteilles pour qu’elles deviennent réemployables. De plus, des modèles de réemploi existent déjà à date, en Allemagne ou dans le nord de la France (brasserie Meteor).
- Les riz, pâtes et légumes secs : Il s’agit de produits qui peuvent être facilement vendus en vrac : non périssables, pas de risque de casse, ne provoquent pas d’éclaboussures dans les magasins, etc. Ces produits peuvent être réemployés par des consommateurs qui apportent leurs propres emballages, qu’ils réemploient de leur côté.
- Les emballages industriels et commerciaux (qui ont par ailleurs été étudiés plus en détail): Ces emballages font référence aux emballages qui transitent entre industriels, et qui déjà largement standardisés et dont une partie est déjà réemployée (ex : les palettes, les caisses, les fûts, etc.).
La figure ci-dessous indique les potentiels de réemploi à horizon 2027 tels que définis par l’étude, et ce pour l’ensemble des secteurs.
Pour aller plus loin :
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